Too Cool for School
Les enjeux liés à l’avenir de l’enseignement ont toujours été l’objet de questionnement et de restructuration. Dans le prolongement des idéaux progressistes de mai 68, un certain nombre d’initiatives ont bourgeonné afin d’offrir des alternatives aux structures traditionnelles. Plus récemment, ce processus a largement été favorisé grâce à l’évolution des modes de communications en ligne. Fondée en Grande-Bretagne en 1969, l’Open University offre une des expériences les plus significatives dans le domaine. Son but initial visait à promouvoir un service d’enseignement à distance par le biais d’une documentation enregistrée et écrite envoyée ponctuellement à des étudiants dispersés à travers le pays. Grâce à la mise en place d’un programme rigoureux, l’OU s’est rapidement imposée comme une alternative abordable et légitime et les titres décernés ont désormais une reconnaissance internationale. Avec l’avènement d’Internet, les modes de fonctionnement et la portée OU a pris un virage significatif. Les cours et les séances de tutorat en ligne ont succédé à l’envoi d’enveloppes imposantes et de longs coups de téléphone. Du même coup, les programmes s’inscrivent dans une perspective mondialisée, drainant des étudiants en provenance des coins les plus reculés du globe.
Depuis peu, de nouvelles initiatives s’appuyant sur les formes d’échanges apportées grâce au web participatif ont vu le jour. Supportée par une interface épurée et fonctionnelle, The Public School a été fondée à Los Angeles dans le courant des années 2000 et dispose déjà d’une dizaine d’antennes à travers le monde. À mi-chemin entre les réseaux de partage des savoirs, des programmes d’éducation pour adulte et d’université populaire, elle propose une liste de cours proposé uniquement par le public. Quiconque possédant une connaissance approfondie dans un domaine spécifique peut ainsi dispenser un enseignement. Quand les inscrits atteignent un nombre défini, la classe peut débuter. Inversement, il est également possible de suggérer le thème d’un cours et The Public School se charge de trouver un enseignant qualifié dans le domaine lorsque le nombre d’inscrits est suffisant. De la géométrie non euclidienne au yoga, en passant par l’impression de textiles ou l’apprentissage des derniers logiciels de programmation, ce programme « sans curriculum » permet une juxtaposition de cours touchant des thèmes individualisés.
À partir de ce principe élémentaire de l’offre et de la demande, il faut compter en général 5 $ pour assister au cours qui, à la différence de l’Open University, prend place dans un lieu physique. Le montant ainsi récolté est versé à l’enseignant en guise d’honoraires. Ce type d’initiatives en sont à leurs prémisses, mais elles dessinent déjà quelques changements susceptibles de frapper notre manière d’envisager l’enseignement. Elles indiquent un certain nombre de perspectives qui, d’une manière ou d’une autre, va influencer les manières d’apprendre ou d’enseigner dans le futur. The Public School constitue une réponse particulièrement pertinente pour pallier aux coups d’accélération du monde contemporain. Grâce à ces formules « à flux tendu », il est notamment possible de traiter des sujets qui permettent d’offrir des réponses ponctuelles et actualisées. De plus, ces plateformes informelles constituent des opportunités d’enseignement aux nombreuses personnes qualifiées et autodidactes qui n’ont pas, ou ne souhaitent pas, intégrer des structures traditionnelles d’éducation. Comme les exemples de TED ou de la Red Bull Music Academy le démontrent, les questions touchant au partage et à la privatisation des programmes de formation vont être un terrain d’enjeux important dans les années à venir.